Un peu plus tôt que prévu,
Le choc que ça a été,
Ça, je l'aurais jamais cru
Que ma femme puisse me tromper
D'une telle manière
Couchée sur le canapé,
Qu'elle paraissait vulgaire,
Il n'aurait plus manqué
Que les chips et la bière,
Criant : "Allez! Allez!"
Elle regardait, misère,
Du foot à la télévision.
Elle n'a même pas nié,
Prise la main dans le sac.
Elle m'a juste demandé
si j'voulais un cognac
Me jurant ses grands Dieux
Qu'cétait la première fois
Des larmes pleins les yeux,
Qu'elle ne le referait pas,
Mais je garde pour l'éternité
Cette image primaire :
Ma femme criant "Allez!"
Et regardant, misère,
Du foot à la télévision.
Mais la v'la qui s'emballe
Et qui m'dit d'une voix sombre
Qu' tout le monde aime le football
Quand c'est la coupe du monde.
Elle dit qu'à l'extérieur,
Y a un grand feu grégeois
Qui brûle dans les cœurs
De chacun ici bas,
Qu'en chaqu' individu
Sommeille un supporter
Gueulant des "Non di d'jus"
Et regardant, misère,
Du foot à la télévision.
Je lui réplique alors
Qu' j' accorde aucun crédit
À la voix du plus fort
Ou celle du plus hardi,
Qu'il y a tant de gens certes
Qui déifient le ballon,
Tant de mouches bouffent de la merde,
C'est pas pour ça qu' c'est bon.
J'ai horreur des drapeaux
Qui s' font sans cesse la guerre
Ce sont les mêmes oripeaux
Que l'on agite, misère,
Au foot à la télévision.
C'est vrai qu'on pourrait s' dire
Histoire de s' rassurer
Qu' ça aurait pu être pire,
J'aurais pu la retrouver
En train d'assister
À la messe du dimanche
Supporter
Aguichant le curé
Dans sa longue robe blanche.
J'aurais pu la retrouver
Au bras d'un militaire
Debout d'vant la télé
Et regardant, misère,
Du foot à la télévision.
Ignorant mes propos,
Il a fallu qu'elle sorte.
Alors sans dire un mot
Elle a claqué la porte
Pour être à la mi-temps
Sur la place du village
Pour voir sur grand écran
Ces jeux de moyen-âge
Qui transforment les humains
En troupeaux de moutons,
Avec des jeux, du pain,
Plus de révolution,
Du foot à la télévision.
Du foot à la télévision...
Du foot à la télévision.